Ciblé par l’opération de déguerpissement engagée par la communauté urbaine de Yaoundé (Cuy) en 2009, pour la construction des habitats « meilleurs », le site surle tronçon allant du carrefour Messa au camp Yeyap, est aujourd’hui occupé d’un côté par des nordistes, pour la plupart, ayant fait de ce secteur  un lieu de détente : le secteur du bili. 

 

Surface plane et presque déserte avec de gros amas de terre utilisés pour niveler le sol de la zone abandonnée à elle-même depuis des années, qui se trouve du côté droit du tronçon, en allant vers le carrefour Messa. On dirait un entrepôt de terre. L’on croirait que la présence d’un engin sur cette zone est un signe que des travaux vont démarrer bientôt. Que non ! Un Caterpillar appartenant à la société chinoise Ifh est en train d’effectuer des travaux de remblage. Raison, « l’Etat veut construire un canal de déviation des eaux comme celui qu’on construit à Warda. Les travaux vont démarrer ici, une fois que ceux de là-bas terminés », sur le sol, des traces et débris de maisons détruites encore visibles. Du côté gauche, dans le vaste marécage maisons, broussaille, détritus ménagers et rigole se côtoient. L’endroit est envahi par la broussaille .on dirait une plantation à l’abandon, en plein centre urbain.

Visage d’une savane

A force d’attendre que la communauté urbaine valorise cet espace comme convenu, certains riverains profitent encore des puits creusés par les anciens occupants. Comme ce mercredi, 21 septembre 2016, à Elig-Effa, non loin du camp Yeyap, il est environ 12 heures. Un jeune homme fait sa lessive non loin d’un puits. A l’aide d’une corde, il recueille de l’eau pour rincer sa lessive. D’autres par contre ont plutôt transformé une partie du secteur gauche de ce quartier en buvette traditionnelle. Notamment sur le chemin qui mène au domicile du chef d’Elig Effa. Ici c’est le « secteur du Bili bili », une boisson alcoolisée locale fabriquée à base de maïs et de mil. Il est vendu à 100 cfa la calebasse. Ici, vit une forte communauté des ressortissants de l’Extrême-Nord du Cameroun.

Marécage

Un petit commerce s’y est développé  avec des petits hangars, leur servant d’abris, sous lesquels des vendeurs proposent aux clients des beignets, du poulet fris, des œufs etc. Ils sont très méfiants. « Nous sommes ici tous les jours », lance l’un d’eux. L’odeur d’un inconnu les alerte tous avec des regards furieux. Ce commerce est très prospère ici. Bien drôles ces nouveaux logements en milieu urbain, qui avant le déguerpissement de ses habitants, était un lieu de « référence », pour les bâtiments en planche, terre battue et parpaings et d’autres bicoques tels que des ateliers, débits de boisson, maisons d’habitation enfouies dans le marécage. A cet époque, l’argument de moderniser la ville était brandit pour justifier les actions conduites par la communauté urbaine. Le site qui abritait il y a plus de cinq ans des maisons ressemble aujourd’hui à un champ en friche. La broussaille a envahi la grande surface derrière le secteur du bili bili, qui donne l’allure d’une savane en plein cœur du centre urbain. Difficile de se rappeler qu’il y avait des maisons à cet endroit où des occupants avaient déjà mené  près d’une dizaine d’années d’activités.

S.R.T.