Le juge d’instruction près le Tribunal criminel spécial a reconnu « suffisantes » les charges contre le président de la Fédération camerounaise de volleyball et ordonne son renvoi devant cette juridiction spéciale pour y être jugé conformément à la loi

S’achemine-t-on inéluctablement vers une probable condamnation, pour détournement de deniers publics, de Serge Julien Abouem A Boull par le Tribunal criminel spécial (Tcs) ? Nous serons tentés de répondre par l’affirmative. Car, le Juge d’instruction du Tcs vient de déclarer « suffisantes » les charges contre le président de la Fédération camerounaise de football (Fecavolley), inculpé d’avoir « commis le crime de détournement de deniers publics de la somme de 106 000 00 de francs Cfa prévu et réprimé par les articles 74 et 184 alinéa (1) a du code pénal à l’accusation ci-dessus spécifiée ». Une information qui vient sanctionner l’instruction judiciaire ouverte le 11 mai 2016 contre Serge Julien Abouem A Boull. En conséquence, le juge d’instruction près le Tcs a signé le 10 aout 2016, une ordonnance de renvoi du concerné devant le Tribunal criminel spécial « pou y être jugé conformément à la loi ». Et connaissant l’appétit vorace du rapace qui ne libère pratiquement jamais sa proie une fois que celui-ci se retrouve entre ses serres, on peut imaginer que le Président de la Fecavolley échouera dans les geôles de la Prison centrale de Yaoundé.

Enrichissement illégitime

Pour comprendre de quoi est réellement accusé le président de la Fecavolley, il faut remonter à 2014. Agissant pour le compte d’Emergence group Sa et en qualité de plaignant et de témoin dans une procédure pénale contre Julien Serge Abouem A Boull, « pour escroquerie et abus de confiance », le cabinet Kolwe et Darna, dans une plainte déposée au Tcs présentait les faits suivants. « Courant l’année 2014, Emergence Group Sa a signé un contrat avec Abouem A Boull Julien Serge, président de la Fecavolley en vue de permettre à Emergence group Sa de préfinancer des prestations diverses des activités des équipes nationales dames et messieurs qualifiées aux Championnats mondiaux de volleyball 2014 en Italie et en Pologne d’une part, et de la participation desdites équipes aux différents championnats mondiaux en Italie et en Pologne ».

Les fonds spéciaux mis à la disposition de la Fecavolley par le régisseur Eric Binfon sont des fonds publics. C’est du moins ce que soutenait le Cabinet Kolwe et Darna. « La destination desdits fonds était le remboursement de la somme de 113 000 000 de francs Cfa mise à la disposition de la Fecavolley », rappellait le Cabinet qui s’interrogeait sur le fait que « la disparition du circuit des préfinancements de la somme de 56 000 000 de francs Cfa constituant la différence entre les fonds spéciaux de l’Etat remis à la Fecavolley par monsieur Eric Binfon (113 000 000) et celle de 57 000 000 de francs Cfa effectivement reversée à Emergence group Sa par la Fecavolley, pose le problème de savoir si ces fonds publics spéciaux n’ont pas tout simplement été détournées par le président de la Fecavolley pour un enrichissement personnel et illégitime ».

Sanctions

Voilà la raison qui a poussé le cabinet Kolwe et Darna à écrire à madame le Procureur général près le Tribunal criminel spécial du Cameroun pour que cette juridiction spéciale « ouvre une enquête préliminaire pour détournement des deniers publics afin de déterminer l’utilisation desdits fonds spéciaux par monsieur Abouem A Boull Julien Serge, es qualité président de la Fédération camerounaise de volleyball et monsieur Eric Binfon, régisseur des fonds virés au ministère des Sports par le ministère des Finances ». Les faits ci-dessus décrits, rappelons-le, sont constitutifs de l’infraction de détournement de deniers publics des articles 74 et 184 du Code pénal camerounais, ensemble des dispositions de l’article 2 (nouveau) de la loi n°2011 portant création du Tribunal criminel spécial modifié et complété par la loi n°2012/011 du 16 juillet 2012.

Sur l’ordonnance du juge d’instruction signé ce 10 aout, on peut lire que le sieur Abdoulrassoul Abakar, Président directeur général d’Emergence group Sa a relevé qu’en dénonçant les faits, son but premier était la sanction de leur auteur parce que l’Etat avait donné toutes les assurances de paiement à son groupe, la réparation du préjudice pouvant être envisagée bien après. L’ordonnance informe aussi que sieur Zambo Manga Eleuthère Joseph, chef de la Division des affaires juridiques au ministère des Sports et de l’éducation physique, désigné représentant dudit ministère, s’est constitué partie civile pour le compte de son département ministériel et s’est réservé de fixer le montant des dommages intérêts en temps opportuns. Idem pour sieurs Mbang Oliboko Honoré et Oumate, cadres à la Division des affaires juridiques du ministère des Finances. 

Achille KAMGA