Le cabinet français a animé un séminaire sur la gouvernance des entreprises publiques au Cameroun les 8 et 9 juin dernier. L’objectif in fine, les entreprises camerounaises doivent s’arrimer aux standards internationaux de la gouvernance.
C’est à dessein qu’Alamine Ousmane Mey, ministre des Finances du Cameroun, a initié et présidé le séminaire sur la gouvernance des entreprises publiques au Cameroun. Tant les entreprises publiques camerounaises ont mal à leur gouvernance. Avec un top management en général des plus contestés en Afrique. Tenus les 8 et 9 juin 2016 à Yaoundé, les travaux avaient pour thème général « Améliorer la gouvernance au service de la performance des entreprises publiques. Et c’est le cabinet français Up2us qui a été choisi pour animer le séminaire. 13 entreprises ont répondu à l’invitation du ministre des Finances. La Sonara, la Scdp, la Camwater, le Pad, la Camair-co, les Adc, la Sic, la Maetur, le Crédit foncier du Cameroun, la Camtel, la Campost, la Cicam, le Feicom. Tous représentés par leurs Président du conseil d’administration (Pca), les Directeur généraux (Dg) et les Responsables opérationnels (Ro). Mais aussi en présence des représentants des tutelles techniques et financières de ces entreprises.
Le cabinet Up2us, dans sa présentation, n’a pas manqué de tancer ces responsables pour la plupart, auteurs de gestions calamiteuses des structures qu’ils gèrent, pour diverses raisons. La première difficulté soulevée par Patrice Pasquier du cabinet français Up2us, relève du fait que les entreprises publiques peuvent souffrir au moins autant d’ingérences politiques directes indues que de la passivité totale ou de la distance de l’Etat actionnaire. Entre l’usager et la direction de l’entreprise, précise le cabinet Up2us consulting, « peut s’interposer un millefeuille d’intermédiaires ». Au Cameroun, on a conscience de l’influence des élus, via le parlement, mais aussi le gouvernement et la bureaucratie politique. Ce qui tend à accroître selon Pasquier la latitude discrétionnaire des dirigeants des entreprises publiques. Et on assiste souvent à une dilution des responsabilités. Bien plus, il faut relever avec Up2us consulting le fait que de nombreux dirigeants d’entreprises publiques se retranchent derrière les impératifs de service public pour justifier des performances médiocres.
Services rendus
En outre, les entreprises publiques rencontrent des difficultés de gestion depuis le sommet. Le cabinet français fait remarquer par exemple que l’indépendance du Conseil d’administration est « bien illusoire ». Et à l’épreuve de la réalité sur le terrain, l’équipe de Patrick Pasquier a raison de le mentionner. Car, les nominations de Président de conseil d’administration (Pca) au Cameroun, comme dans beaucoup d’autres pays d’ailleurs, se font à l’endroit des personnalités qu’on voudrait remercier pour « services rendus » à l’Etat. Conséquence, on se retrouve chez nous avec des grabataires à la tête des entreprises publiques. Même s’ils ne sont pas en charge de la gestion quotidienne de ces entreprises, ils occupent tout au moins un poste qui appelle à une plus grande lucidité et maitrise de la chose dans les prises de décision. Toujours est-il que dans ces cas, le fonctionnement est bien souvent influencé directement par les sphères politiques.
Un autre pan de ces plaies qui gangrènent la gouvernance des entreprises publiques au Cameroun, est le pouvoir de contrôle faiblement exercé par les administrateurs en l’absence d’incitation suffisante et d’absence de responsabilité personnelle. A ce sujet, Pasquier regrette la proximité souvent très forte entre les administrateurs et les dirigeants liée à des origines éducatives ou professionnelles communes. Que n’entend-on pas souvent au Cameroun sur les affinités que partagent le Chef de l’Etat par exemple ou encore d’autres hautes personnalités du régime d’avec les directeurs généraux et Pca d’entreprises publiques. Ceux qui sont souvent dans les secrets de Dieu, n’hésitent pas à attribuer la nomination d’untel ou untel, à sa proximité ou celle d’un parent proche ou ami de longue date avec les « hauts dignitaires » du pays. La conséquence qui en découle forcément est le maintien de ces responsables à la tête de leurs entreprises respectives malgré des résultats médiocres dont ils sont les premiers comptables.
Financements
Ainsi, tous pantois et assis « inconfortablement » dans leurs chaises, les Pca, Dg et Ro en ont pris de la graine de cette démonstration d’Up2us consulting. Surtout que beaucoup se sont retrouvés dans les risques liés à une gouvernance défaillante. A savoir, la sous-performance, les conflits internes et externes, la dégradation de la réputation, la difficulté à recruter et à conserver les meilleurs talents, les pratiques de corruption et détournement de fonds. Or, toutes ces entreprises gagneraient à appliquer les pratiques de bonne gouvernance qui pour Patrick Pasquier présentent de gros avantages : Vision et missions claires et partagées ; la création de valeur ; le développement durable ; le respect des intérêts des parties prenantes, transparence et éthique ; accès aux financements internationaux.
Quelques principes de bonne gouvernance pour atteindre ces objectifs sont évoqués par le cabinet français. La garantie d’un cadre juridique et réglementaire efficace ; la clarification des rôles et missions de l’Etat (ce que doivent faire l’actionnaire, le stratège et le contrôleur est bien défini) ; le renforcement du rôle et des responsabilités du Conseil d’administration ; l’assurance que les actionnaires sont bien traités ; la diffusion de l’information de manière transparente. Voila non exhaustif, un ensemble de pratique de bonne gouvernance dont le ministre Ousmane Mey espère être pris en compte par les Pca, Dg et autres responsables au sein des entreprises publiques. Le Minfi y accorde d’ailleurs du prix au respect de ces principes, car pour lui, « dans un environnement caractérisé par la rareté des ressources de l’Etat, une forte concurrence dans les différents secteurs où interviennent les entreprises publiques, la gouvernance constitue l’un des pré-requis nécessaires à l’accès au financement privé ».
Achille KAMGA
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