Statut de l’opérateur économique, taxe de séjour dans les hôtels, soumission à l’Impôt sur les sociétés, Taxe sur la valeur ajoutée des appartements meublés, augmentation du prix du timbre communal… l’Etat doit opérer des mesures drastiques pour renflouer ses caisses cette année. Des mesures fortement contestées par les économistes.

 

Le gouvernement vient de décider contre toutes attentes, de mettre un terme à la pause fiscale en vigueur au Cameroun depuis plusieurs années. En effet, pour atteindre l’objectif de 6% de croissance en 2017, conformément aux attentes  du Fonds monétaire international (Fmi) qui veut que le déficit budgétaire soit ramené à 1,5% (contre 3,3 % actuellement), le gouvernement doit opérer des mesures drastiques pour renflouer les caisses de l’Etat. Et pour cette année 2017, pas moins d’une trentaine de mesures fiscales et douanières vont être appliquées pour collecter les 4373,8 milliards Fcfa représentant le budget 2017.  Selon la Direction générale des impôts, il s’agit entre autres de l’institution d’un statut d’opérateur économique agréé qui astreint au civisme fiscal; de l’institution d’une taxe de séjour variant de 500 à 5000 Fcfa par nuitée selon le standing de la structure d’hébergement; la soumission à l’Impôt sur les sociétés et à la Taxe sur la valeur ajoutée (Tva) des appartements meublées à usage de location; le timbre communal qui devrait passer de 200 à 600 Fcfa pour les papiers format A4 et de 400 à 1000 Fcfa pour les formats supérieurs. Ceci dans le but « d’améliorer les conditions de vie des citoyens » si l’on croit le Directeur général des impôts.

Système productif

Par ailleurs, apprend-on, dix autres nouvelles mesures sont envisagées pour mobiliser les recettes. Notamment la taxation de l’exportation des plantes médicinales, avec un taux de 2 % imposé au droit de sortie; l’assujettissement des véhicules de plus de 10 ans aux droits d’accises pour lutter contre la pollution et contribuer à la sécurité des routes; la réintroduction des droits de taxe et de douanes sur l’importation du clinker (matière première utilisée pour la fabrication du ciment) et le riz (Tva à 19,25 % ); Autre mesure, l’augmentation de 17,5 % à 20 % du droit de sortie sur le bois en grumes pour encourager la transformation locale; etc. Rappelons que la Direction générale des douanes et la Direction générale des impôts ont signé en juin 2016, un accord de collaboration dans la perspective de cette approche. Cependant, l’option prise par le gouvernement est fortement contestée par des experts. « Le problème des solutions comme l’augmentation des recettes publiques par les impôts est qu’on tente de résoudre les difficultés de l’Etat alors que le problème relève du système productif tout entier », explique l’économiste Dieudonné Essomba.

Le président de l’Ecole africaine d’économie contemporaine, affirme aussi que « de telles mesures ne sont indiquées qu’avec un système économique équilibré par rapport à l’extérieur ». Bien plus, l’économiste reste convaincu de ce qu’« il ne faut jamais y recourir quand le pays a des problèmes de balance courante. Il faut faire exactement l’inverse, autrement dit, trouver des mécanismes qui réduisent les dépenses publiques, au profit des dépenses des autres acteurs moins extravertis » Pour l’analyste, « la bonne solution consiste à orienter de gré ou de force la demande vers la production locale, indépendamment de sa qualité ou de son coût ». Il est clair que cette augmentation de l’impôt sur la consommation (Tva, et droits d’accises) augure des jours difficiles pour la population.

Facteurs endogènes

La situation est encore plus aggravée par les contraintes auxquelles le gouvernement doit faire faire face en matière de politique budgétaire. La lutte contre la secte « Boko Haram » et l’insécurité aux frontières notamment avec la Rca, qui induisent des dépenses de sécurité de plus en plus importantes et imprévisibles. Aussi, le maintien à la baisse des cours mondiaux des matières premières notamment du baril de pétrole, qui contraint les recettes propres de l’Etat.  L’entrée en vigueur depuis le 04 août 2016 de l’Accord de partenariat économique entre le Cameroun et avec l’Union européenne qui consacre la réduction des droits de douane sur certains produits en provenance de l’Ue. Par ailleurs, on note aussi la poursuite de la mise en œuvre du Plan d’urgence triennal; la mise en œuvre du Plan d’urgence spécial jeune annoncé par le chef de l’Etat; l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations de 2019; la poursuite de la mise en œuvre des grands projets structurants; l’augmentation des charges de la dette de l’Etat en raison de son accroissement ces dernières années.

Achille KAMGA (Le Messager)